La très grande majorité des locataires commerciaux s’étonnent de constater que le projet de bail dit standard du propriétaire comporte un très grand nombre de pages. Et au fait, pourquoi un bail commercial est aussi long ? Pour bien comprendre cette réalité, nous devons traiter de l’économie générale du Code civil du Québec. Nous discuterons des 5 facteurs spécifiques qui font que les baux commerciaux sont longs.

L’ordre public

Au départ, le Code civil du Québec contient deux types d’articles : ceux qui sont d’ordre public et ceux qui ne le sont pas, qu’on appelle souvent les articles supplétifs. Les articles d’ordre public sont des dispositions obligatoires et même si deux parties à un contrat s’entendent pour dire qu’ils ne respecteront pas une disposition d’ordre public, cette entente est illégale, donc inexistante. L’infime minorité des articles du Code civil sont d’ordre public.

En termes clairs, l’article d’ordre public s’applique peu importe les circonstances, alors que l’article supplétif s’applique si les parties ne se sont pas entendus sur le sujet traité par l’article en cause.

Exemple simple : l’article 541 du Code civil édicte que : «Toute convention par laquelle une femme s’engage à procréer ou à porter un enfant pour le compte d’autrui est nulle de nullité absolue» Il s’agit d’un contrat de mère porteuse. Le Code civil dit que c’est illégal, peu importe les circonstances et les volontés des personnes en cause. C’est un article d’ordre public. Par contre, voici l’exemple d’un article supplétif : l’article 1883 du Code civil : «Le locataire poursuivi en résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer peut éviter la résiliation en payant, avant jugement, outre le loyer dû et les frais, les intérêts au taux fixé en application de l’article 28 de la loi sur le ministère du Revenu ou à un autre taux convenu avec le locateur si ce taux est moins élevé».

En matière de bail commercial, les articles 1851 à 1891 du Code civil du Québec s’appliquent, à titre supplétif. À vous de voir quels sont les articles que vous ne voulez pas appliquer dans votre relation de locateur-locataire.

L’obligation ou pas d’un contrat écrit

Peu de contrats requièrent l’écrit. De ce nombre, on retrouve le contrat de mariage, l’acte d’hypothèque, le testament. Faute d’écrit dans ces cas, ils n’existent tout simplement pas. À moins d’une disposition d’ordre public à cet effet, un contrat valablement formé peut être sous forme verbale ou écrite. Dans le cas de baux commerciaux, il n’y a aucune exigence d’un écrit. Mais de façon pratique, il est toujours plus pratique de faire la preuve d’une entente lorsque la volonté des parties a été mise par écrit et signée par elles.

L’article 1434 du Code civil

Il est tellement important que nous vous le citons : «Le contrat valablement formé oblige ceux qui l’ont conclu non seulement pour ce qu’ils y ont exprimé, mais aussi pour tout ce qui en découle d’après sa nature et suivant les usages, l’équité ou la loi.». Donc si vous n’exclues pas explicitement ou implicitement l’application de cet article, vous pourriez avoir des obligations que vous n’avez jamais acceptées.

L’article 1375 du Code civil

Le voici : «La bonne foi doit gouverner la conduite des parties, tant au moment de la naissance de l’obligation qu’à celui de son exécution ou de son extinction.». C’est évidemment un article d’ordre public. Le Code civil nous interdit donc d’agir de mauvaise foi. Une des possibilités de se faire dire qu’on agit de mauvaise foi peut être que nos agissements ne sont pas conformes aux usages. Pour contrer cette possibilité, il faut prévoir explicitement dans le bail les agissements qui se produiront face à pareille situation.

«Trop fort casse pas»

Le dernier élément qui fait que les baux commerciaux sont volumineux est que certains vont répéter des dispositions prévues au Code civil dans des termes différents. Par exemple, la Loi prévoit que la seule devise qui a cours légal au Canada est le dollar Canadien. Malgré tout, certains baux vont avoir une clause à l’effet que tous les montants d’argent prévues au bail sont en dollars Canadiens. C’est parfaitement inutile, sauf si le siège social de l’une des parties n’est pas au Canada.

Maintenant la vraie question : pourquoi un contrat commercial peut avoir de 2 à 100 pages ? Vous le savez !

  1. L’ordre public : on veut s’assurer que le locataire loue pour une activité licite;
  2. La «nécessité» du contrat écrit : c’est une question de preuve. On veut être capable de faire la preuve que nous nous sommes entendus avec le locataire sur les obligations spécifiques;
  3. L’article 1434 du Code civil : on veut s’assurer d’exclure des obligations qui pourraient exister par ailleurs, basé sur les usages, l’équité ou autre;
  4. L’article 1375 du Code civil : on veut mettre de côté l’application de certaines des 40 dispositions supplétives du Code civil relatives au bail commercial, par exemple, si on poursuit un locataire pour non paiement de loyer, on ne veut pas que le locataire puisse régulariser la situation jusqu’au prononcé du jugement;
  5. «Trop fort casse pas» : on veut s’assurer que le locataire a parfaitement conscience de toutes ses obligations.

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